“Y’a v’là l’éléphant dans la maison”, doux euphémisme qui nous prend d’assaut dès l’ouverture des portes de Trinity, l’excellent album de Laylow sorti le 28 février dernier.
En effet, difficile de passer à côté d’un album aussi dense et immersif dont les critiques ET les ventes (pour une fois) n’ont fait que confirmer ce que l’on savait déjà : Laylow est un prototype rapologique à part.
À une époque où les références, plus ou moins subtiles, à la pop culture sont légion dans les morceaux de rap, le rappeur toulousain en a fait un concept d’album entier.
Sans forcément les citer, ici les inspirations sont cadrées et agencées pour former un univers à part, unique et cohérent : Trinity.
Si la filiation à Matrix est évidente pour le fond noir et post-apocalyptique du disque, celle au film Her, qui retrace une romance numérique entre un humain et une intelligence artificielle, est la seconde corde principale de cet album.
Dès le premier morceau, le toulousain nous emmène dans cet univers post-apocalyptique sombre et futuriste, duquel il sera à la fois guide, narrateur et personnage principal.
DurĂ©e de l’immersion : 55 minutes, soit 15 morceaux et 7 interludes au cours desquels vous aurez droit Ă un panel d’ambiances et d’émotions aussi large que variĂ©, avec le monde de Trinity toujours en toile de fond. De la ride nocturne de HILLZ aux refrains traĂ®nant de LONGUE VIE en passant par l’excellent storytelling …DE BATARD, cet univers fictif est vaste, sombre et sans pitiĂ©.
Sans envie d’en finir ni de s’en sortir pour autant, la mélancolie, soutenue par le filet d’autotune juste et nécessaire, se dissémine sur toute la durée de l’album. Tantôt dure et implacable sur PIRANHA BABY, tantôt plus calme sur DEHORS DANS LA NIGHT.
Si le ton n’est pas nouveau, il est a contrario le point d’orgue d’un chemin musical tracé par Laylow depuis 2016 avec ses 4 EP, le rappeur allant même jusqu’à s’auto-référencer au détour de quelques phases (“La cigale ayant chanté tout l’été” / “On s’connait que depuis RAW-Z”.
Si cet album est considĂ©rĂ© Ă juste titre comme une rĂ©ussite, c’est aussi et surtout dĂ» Ă une cohĂ©rence instrumentale totale et complète. PrĂ©sente dans chaque morceau, la noirceur Ă©lectro-numĂ©rique n’allume jamais complètement la lumière, mais joue avec de simples halos de couleurs. IllustrĂ©e jusque sur la pochette, elle nous garde confinĂ©s dans cet univers futuriste.
Les albums concepts n’étant pas nombreux à notre époque, le parallèle avec JVLIVS peut être tentant. Cependant, il se limite à la présence des interludes, dont le rôle est de séquencer le disque en chapitre. Ces respirations ajoutent encore un aspect cinématographique à un album-film porté à l’écran par d’excellents clips, et des featuring de très bonne facture en guise de seconds rôles.
Si la pĂ©riode actuelle se prĂŞte justement au dĂ©veloppement de votre culture musicale et cinĂ©matographique, il va de soi que Trinity est l’album qu’il vous (nous) faut ! Ă€ nous de vous encourager Ă aller l’Ă©couter et de souhaiter une longue vie Ă ce projet !
Tout Trinity est disponible ici
Une chronique Ă©crite Ă quatre mains par le prĂ©sident du FC Alain Bashung et un adhĂ©rent actif de l’AS BĂ©ret-casquette.